«Ce n’était pas une option mais une nécessité». En présentant le nouveau lac de rétention créé sur son domaine skiable, le directeur deTéléchampéry-Les Crosets Portes du Soleil, Pascal Bergero, ne mâche pas ses mots. «C’est le chantier du siècle. Nous devions assurer de la neige à Noël. Grâce à cet ouvrage, c’est désormais possible.» Financé à parts égales de 4 millions de francs par le canton via un crédit NPR, la société de remontées mécaniques et une institution bancaire, le nouveau lac de Chaudron a nécessité cinq ans de procédures, deux de travaux.
Désormais, la retenue collinaire peut accueillir près de 100 000 m3 d’eau et alimenter 100 canons à neige en même temps. «Jusqu’ici, nous ne pouvions faire fonctionner que huit canons simultanément. Enneiger correctement le domaine en début de saison nous prenait un mois. Aujourd’hui, nous ne créons pas plus de neige, mais le faisons bien plus vite quand les conditions sont propices», poursuit Pierre-Marie Fornage, président de TCCPS. L’usine à neige a été intégrée dans la digue du lac pour réduire les impacts sonores et visuels de l’installation technique. Un biotope de 2600 m2 adjacent au bassin a également été réalisé en contrepartie écologique.
La Suisse se met à niveau
Sur les 100 kilomètres de pistes du domaine de Champéry-Les Crosets, une cinquantaine pourront être enneigés artificiellement grâce au lac alimenté par les torrents du Naulaz et du Seumon. «Il s’agit de la piste bleue des Creusets, la Léchereuse et Grand-Conche qui n’étaient jusque-là pas reliées au réseau. Et dès l’hiver prochain, la piste des Mosettes sera intégrée au système», informe le président.
Un ouvrage d’un tel volume est une nouveauté dans le paysage du Valais romand. Selon Berno Stoffel, président des Remontées mécaniques valaisannes, le domaine d’Aletsch Arena possède un lac de rétention d’une taille semblable. «Désormais, les systèmes d’enneigement devront tous pouvoir assurer un domaine blanc en quelques jours. C’est un standard en Europe et la Suisse se met à niveau. Ce sont des installations essentielles pour le début de l’hiver, mais pas seulement. Les remontées mécaniques sont de plus en plus rapides et les pistes plus utilisées. La couche de fond doit donc être plus solide et épaisse pour garantir une belle saison.»
Attirer les skieurs français
Le mégaouvrage a été partiellement mis en fonction cet hiver et a déjà suscité des retombées positives. L’enneigement mécanique a assuré une couche de fond sur des passages clés de la liaison avec la France. «Les chiffres de cet hiver montrent une augmentation de 15,2% de skieurs provenant du côté français des Portes du Soleil», détaille Enrique Caballero, responsable de la communication de TCCPS. «La neige artificielle sur ces tronçons permet de décongestionner la France, ce qui profite à tous.» Dès l’hiver prochain, la société compte ouvrir son domaine dès la mi-novembre.
Portes du Soleil Suisse : le rapprochement des sociétés avance
Il aura fallu attendre le naufrage de Télémorgins-Champoussin pour qu’une société regroupant les remontées mécaniques des Portes du Soleil
côté suisse voie le jour en 2017. Nommée Portes du Soleil Suisse SA
(PDS-CH), la société est dirigée et présidée par les mêmes personnes que
Télé Champéry–Les Crosets et a dans un premier temps simplement permis
le sauvetage de Morgins et de Champoussin. Désormais, PDS-CH négocie le rachat de Torgon
et de Chalet-Neuf Bellevue, deux domaines exploités par Châtel. «Nous
ne pouvons plus être cloisonnés chacun de notre côté, alors que nous ne
pesons que 20% du poids des Portes du Soleil», a argué Enrique
Caballero, chargé de communication. «Toutefois, le regroupement n’étant
pas gage de réussite, nous étudions des moyens d’optimiser le domaine.»
Sur les 47 installations existantes, les Portes du Soleil Suisse ne
pourraient en garder que 34. «Le but est d’augmenter l’attractivité de
la boucle suisse avec des installations plus performantes.» 150 millions
devraient être investis sur ces quinze prochaines années sur le versant
helvétique.
Source : Le Nouvelliste, Sophie Dorsaz, 05.03.2019
Illustration : Le Nouvelliste, Héloïse Maret, 05.03.2019